Audition devant le Comité du bulletin de vote le plus long lors des récentes élections canadiennes
Allocution de : Jean-François Blanchet, directeur général des élections
Événement : Étude sur les actions du Comité du bulletin de vote le plus long lors des récentes élections canadiennes, Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre
Lieu : Ottawa
Date : 21 octobre 2025
Pour en savoir plus : PROC - Actions du « Comité du bulletin de vote le plus long » lors des récentes élections canadiennes
La version lue fait foi.
Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs les Membres du Comité permanent, je vous remercie de cette invitation à prendre part aux discussions sur les actions du Comité du bulletin de vote le plus long.
À titre de directeur général des élections du Québec, je suis notamment responsable de tenir et d’organiser les élections provinciales. Mon mandat inclut aussi des fonctions d’enquête, de poursuite et de contrôle du financement des partis politiques.
Au palier électoral provincial, nous n’avons pas vécu ce genre de manœuvre.
Je vous ferai donc part de mes observations au sujet des événements survenus au palier électoral fédéral. Je vous parlerai également de mes inquiétudes et de la recommandation que j’ai formulée à ce sujet devant la Commission des institutions démocratiques du Québec, en avril dernier; recommandation que je souhaite aussi formuler aux représentants de nos élus lors d’un prochain comité consultatif. Les travaux de ce comité, que je préside et coordonne, visent à obtenir l’avis des élus sur des questions relatives à la Loi électorale.
J’ai suivi avec beaucoup d’intérêt les élections fédérales, notamment le problème de multiplication des candidatures, qui s’inscrit dans un mouvement de contestation du mode de scrutin.
J’ai vu, comme vous, le nombre de candidates et candidats sur les bulletins de vote atteindre 40 dans Mississauga-Lakeshore, en 2022; 91 dans Lasalle-Émard-Verdun, en 2024; et 214 dans Battle River-Crowfoot, en 2025.
Je vous pose la question : est-ce que les administrateurs d’élections devraient se préoccuper de ce mouvement?
À mon avis, oui. Nous avons au moins deux bonnes raisons d’être préoccupés par ces activités, dont le principal objectif est de contester le mode de scrutin, et non de faire élire des candidats.
La première raison, c’est que ces actions nuisent au déroulement des élections. Elles vont même jusqu’à irriter les électrices et les électeurs.
Vous le savez, des bulletins de vote trop longs requièrent une logistique spéciale pour les plier et les déplier, pour les faire entrer dans l’urne, pour déterminer le nombre d’urnes nécessaires, pour compter les bulletins, etc. Cet exercice allonge inutilement les délais du processus électoral.
Comme administrateurs d’élections, nous devons offrir un service exemplaire à l’ensemble des électrices et des électeurs. Ce service doit être simple, rapide et efficace.
La deuxième raison, c’est que ces actions sèment la confusion chez les électrices et les électeurs, qui doivent identifier la candidate ou le candidat de leur choix parmi des dizaines de candidatures.
À titre d’administrateurs d’élections, nous devons nous assurer que le vote demeure accessible pour toute personne qui possède la qualité d’électeur, y compris pour les personnes âgées, pour les personnes en situation de handicap et pour les analphabètes.
Actuellement, la Loi électorale du Québec ne dispose pas de mesures qui permettent de contrer efficacement cette problématique.
Je crois que les lois électorales devraient prévoir un mécanisme pour limiter le nombre de candidatures déposées uniquement pour faire en sorte que le bulletin de vote soit le plus long possible.
Des solutions existent dans certaines autres administrations électorales canadiennes, comme :
- Interdire à un électeur d’appuyer plus d’une candidature;
- Hausser le nombre de signatures d’appui nécessaires sur la déclaration de candidature.
Pour ma part, ma recommandation, que je réitère devant vous, vise à interdire à une personne d’être l’agente officielle ou l’agent officiel de plusieurs candidats d’une même circonscription.
Cette interdiction complexifierait le recrutement d’agents officiels et démontrerait le sérieux des démarches visant à poser sa candidature.
Elle serait plus facile à appliquer que l’interdiction, pour un électeur, d’appuyer plus d’un candidat, par exemple.
En conclusion, Monsieur le Président, je vous remercie à nouveau pour cette invitation à prendre part aux discussions. Elles sont nécessaires pour veiller à l’intégrité des élections et pour préserver la confiance des électrices et des électeurs. Je demeure disponible pour répondre aux questions.